La crise mondiale est-elle une menace pour les énergies renouvelables ― avec la chute considérable des investissements prévus ― ou une opportunité pour le développement de nouveaux modes de production ?
Cette crise a certainement été une opportunité pour les énergies renouvelables. Ces derniers seront au cœur d’une relance qui traduit un équilibre entre l’économie sociale et l’environnement. Il faut alors bien se préparer pour faire face aux nouvelles ruptures.
L’énergie photovoltaïque semble être dans une position particulièrement avantageuse. Au fait, le coût de la production du kWh d’électricité photovoltaïque a connu une baisse drastique ces dernières années pour atteindre les 40 millimes. Ce record a été enregistré dans un projet d’énergie solaire à Abu Dhabi.
De la même manière, en Tunisie, le prix de l’électricité photovoltaïque a connu la même tendance baissière. Lors d’un appel d’offres lancé en 2018, le coût non subventionné moyen proposé du kWh variait entre 70 et 80 millimes. Ce prix est 3 fois moins élevé que celui de l’électricité produite par des sources fossiles. Aussi, il faut noter que les prix de l’électricité photovoltaïques peuvent baisser encore plus pour les projets de plus grande envergure.
Ce prix encourage le développement de la filière et l’accélération des programmes. Les sociétés d’énergie, telles que la Steg et l’Etap, peuvent jouer un rôle important pour l’accélération de ce programme avec des coûts compétitifs.
D’un autre côté, la croissance rapide et soutenue de la demande en électricité incite l’apparition de grands projets de production électrique ― aussi bien de sources traditionnelles mais aussi photovoltaïques.
En matière d’atténuation, la Tunisie vise la réduction de l’intensité carbone en 2030 de 41% comparé à l’an 2010. Quels sont les secteurs ou les créneaux qui s’y prêtent le plus aujourd’hui ?
La diminution de l’intensité carbone et la promotion de l’énergie renouvelable sont deux facettes d’une même médaille. Dans ce cadre, je trouve qu’il est opportun de mettre à jour les différents plans d’efficacité énergétique surtout que notre pays était parmi les plus avancés en Afrique.
Revoir ces stratégies est aussi vital, non seulement pour leur important impact environnemental, mais aussi parce qu’elles permettent de réduire la consommation énergétique. Comme vous le savez, l’énergie représente une part importante du déficit commercial du pays.
De quoi a-t-on besoin aujourd’hui pour accélérer le rythme de l’adoption des énergies renouvelables pour atteindre les 30% escomptés en 2030 ?
La plus grande urgence serait d’inciter les secteurs les plus énergivores à améliorer leur efficacité énergétique voire même à augmenter la part des énergies propres dans leur mix énergétique. Ceci est le cas, par exemple, pour les cimenteries, les briqueteries, les industries d’extraction, …
À vrai dire, l’État a déjà mis en place des incitations financières, mais il faut aller encore plus loin en sensibilisant plus les citoyens et les entreprises quant à l’importance de ces questions.
Le transport est aussi un élément stratégique visant à réduire la consommation en énergie fossile. Je suis persuadé qu’il faut passer à la mobilité électrique. En Tunisie, vu nos ressources limitées, nous n’avons d’autres choix que d’opter pour l’électrification du parc automobile. Pour créer le momentum, je propose en revanche de commencer par électrifier les flottes d’entreprises telles que la STEG, la Poste ou encore la Sonede.
À mon avis, il faut agir vite parce que je pense que la transition énergétique offre une grande opportunité pour participer à la construction de la Tunisie de demain. Elle sera la base du nouveau modèle du développement du pays. Qui plus est, les énergies renouvelables peuvent contribuer à la création d’une nouvelle filière industrielle, créatrice d’emplois.
Mais avant tout cela, il faut avoir une bonne gouvernance, car la réussite d’un programme d’accélération de la transition énergétique passe essentiellement par une meilleure gouvernance.
Qu’entendez-vous par bonne gouvernance ?
D’abord, il est essentiel d’avoir une vision globale participative du système énergétique dans sa globalité et ce à court, moyen et long termes. Cette vision doit intégrer principalement les choix futurs de l’industrie et du transport — les deux secteurs à plus forte consommation d’énergie. Cette vision doit être traduite en un programme annuel pour bien suivre son évolution.
Il faut aussi avoir une volonté politique claire et cohérente pour mener cette transformation.
Le leadership est également un élément crucial dans la réussite de cette transition. Ce leadership doit se manifester dans une administration stable et renforcée et une transparence totale pour instaurer la confiance des investisseurs. Dans ce cadre, je pense qu’il faut saluer le gouvernement Fakhfakh qui a redonné à ce secteur son importance stratégique pour jouer un rôle dans la relance économique. Le rétablissement de l’administration en charge du secteur pilotée par une compétence telle que M. le ministre Mongi Marzouk, en est la manifestation.
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