Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir nos meilleurs articles et du contenu exclusif directement dans votre boîte mail.

Banquiers derrière les barreaux: les leçons à tirer

L’arrestation d’un ancien premier dirigeant d’une banque publique et l’interdiction de voyager sur un bon nombre de hauts cadres actuels et anciens posent le problème de la prise de risque dans les métiers fortement réglementés, à l’instar du secteur financier. Nous ne sommes ni en faveur ni contre les inculpés dans ce type d’affaires, mais nous pensons qu’il faut en tirer certaines leçons pour éviter qu’elles recommencent ailleurs.

La première est que l’équilibre entre la prise de risque et le respect du cadre réglementaire dans un petit marché est vraiment compliqué à trouver. C’est encore le cas lorsque la partie variable de la rémunération alimente l’appétit des dirigeants et les pousse à entrer dans une course contre la montre pour la réalisation d’objectifs commerciaux. Dans une banque, cela passe par un encours de crédits plus élevé et une politique agressive pour attirer les bons risques. Toutefois, les clients corporate qui combinent une forte qualité de signature, une solvabilité et une suffisance de garanties sont une minorité pour un marché où il y a plus de 20 établissements de crédit en concurrence.

La deuxième est que l’écart entre les salaires des directeurs généraux des banques publiques et celles privées pose question. Il y a un gap considérable qui n’est pas souvent justifié par une surqualification ou expérience. Ce sentiment d’être sous-payé incite à faire plus que la moyenne pour attirer l’attention des plus grands établissements qui offrent de meilleurs packages.

La troisième est que la structure même de la rémunération d’un directeur général de banque pose problème. Le fait que la partie variable sur la performance de l’exercice « N » soit généralement payée dans les premiers mois de «N+1» est une erreur. Elle encourage la prise de mauvaises décisions qui donnent l’aperçu d’être bonnes à court terme, mais elles sont réellement des bombes à retardement. La rémunération variable doit être établie dans le temps, même après avoir quitté son poste, et qui comporte une proportion significative en actions si l’établissement est coté. Ainsi, un dirigeant percevra concrètement le résultat de son travail qui va plutôt viser la durabilité de la performance.

La quatrième est que siéger au sein d’un conseil d’administration d’une banque ou être membre d’un comité n’est pas seulement synonyme de juteux jetons de présence. C’est avant tout une très lourde responsabilité qui peut renvoyer son titulaire derrière les barreaux. Il faut que les comités de risques et de crédits soient dominés par les indépendants qui osent rejeter les demandes de clients non conformes aux critères fixés par la banque sans avoir peur de la réaction de son directeur général.

Le remède à tous ces maux se résume donc en deux mots: la bonne gouvernance. Si elle est appliquée partout, ce pays changera de statut. Sinon, même si on y injecte des milliards de dollars, il n’avancera jamais.