La digitalisation est souvent citée comme une solution aux maux de la bureaucratie, émancipant les citoyens de l’emprise des chicaneries administratives. Cela n’est malheureusement pas vrai, comme l’a prouvé à maintes reprises l’expérience. Au fait, il s’est avéré que digitaliser un service n’engendre automatiquement pas une amélioration de l’expérience client et encore moins de la qualité du service.
“Il est essentiel que la digitalisation permette de rendre service au citoyen, i.e. de répondre à un besoin”, Elyssa Aounallah Msadaa, directrice associée et cofondatrice de Talys Consulting.
Ceux qui ont tenté d’utiliser certaines des plateformes déployées récemment par le gouvernement dans le cadre des mesures de lutte contre le coronavirus se sont vite rendus à l’évidence de la complexité des procédures. “Il est aussi essentiel que le service requiert le moindre effort possible de la part de l’utilisateur”, a souligné l’experte.“Si pour accéder à un service en ligne l’utilisateur doit d’abord récupérer une attestation de naissance, on ne peut pas dire que la digitalisation a rendu la vie du citoyen plus simple”, a-t-elle ajouté.
Heureusement, le gouvernement a vite rectifié le tir: la plateforme de demande d’autorisations de circulation a été revue pour simplifier les procédures. Plus besoin donc de sauter d’une page à l’autre pour remplir les champs nécessaires. Désormais, il suffit de remplir un formulaire.
Pour Elyssa Aounallah Msadaa, non seulement il faut que le service soit totalement dématérialisé, mais il est aussi important que le service soit suffisamment rapide voire offrir une réponse en temps réel. “Pour les services nécessitant un traitement en back-office, il faut s’assurer que les demandes soient traitées dans les plus brefs délais”, a-t-elle indiqué.
La sécurité est aussi un élément important dans tous les services en ligne. Ceci est d’autant plus valable pour les services traitant des données sensibles et/ou à caractère personnel. S’assurer donc de l’éligibilité d’accès aux données est important. “Il faut que l’authentification soit aussi efficace que possible”, a indiqué la cofondatrice de Talys Consulting. Mais attention: “Il faut que l’authentification soit aussi intuitive que possible”, prévient-elle.
Tous ces éléments contribuent à rendre facile et intuitif l’accès aux services digitalisés, ce qui peut inciter les citoyens à en tirer pleinement profit au détriment des canaux classiques. “Les utilisateurs satisfaits de la qualité du service deviendraient des ambassadeurs, faisant sa promotion de bouche-à-oreille”, a indiqué Aounallah Msadaa.
Cela dit, il ne faut pas oublier de créer des services accessibles au plus grand nombre possible de citoyens. Dans un pays comme la Tunisie, ceci nécessiterait donc de mettre en place des services accessibles, par exemple, par les codes USSD. “Presque tout le monde est habitué à ces codes”, a souligné l’experte, ajoutant que cette technologie a permis à plusieurs pays africains de digitaliser plusieurs services. Cette méthode reste néanmoins limitée, vu qu’elle ne peut accommoder que des services simples. “Pour les services plus complexes, en revanche, il est primordial de passer par des applications mobile ou par le web”, a noté l’expert.
Pour rendre ces services accessibles, la cofondatrice de Talys Consulting propose de tirer pleinement profit de la large présence de bureaux de poste à travers le pays, notamment dans les régions intérieures pour faciliter l’accès des citoyens aux services numériques. Les bureaux de poste peuvent en effet accommoder des ordinateurs en libre accès et connectés à Internet à travers desquels les citoyens peuvent accéder à ces services. Les personnes peu confortables avec l’informatique pourraient aussi bénéficier de l’accompagnement dans l’accomplissement des procédures par des gens dédiés.
Quoi qu’il en soit, il est clair que la digitalisation des services de l’administration est un projet de longue haleine.
Vous avez des questions ?
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux ou contactez-nous et nous vous répondrons dès que possible.