
En Afrique du Nord, le Maroc et la Tunisie en tête, 57 % des entreprises disposent d’un site Internet, avec un potentiel en termes de marketing et de clientèle très large. Ce taux est de 47 % pour les petites entreprises, 67 % pour les moyennes entreprises et 80% pour les grandes entreprises.
Si une grande majorité des entreprises d’Afrique du Nord disposent d’un site Internet, leur mise à jour régulière reste à effectuer, afin de rendre cet outil réellement efficace.
Contrairement aux autres pays, plus de la moitié des petites entreprises au Maroc et en Tunisie possèdent un site Internet, mettant ainsi en évidence une forte dynamique de digitalisation. L’avance du Maroc et de la Tunisie en termes d’utilisation des outils digitaux à des fins économiques est confirmée par l’indice Business to Consumer (B2C), avec des scores supérieurs à 40 en 2019.
Une économie numérisée, mais pas encore digitalisée
En effet, pour que le commerce en ligne puisse s’effectuer de façon optimale, il faut des instruments de paiement dématérialisés et des moyens de transport de marchandises efficaces. L’insuffisance de ces canaux facilitant l’e‑commerce peut expliquer les scores modérés de l’indice B2C en Afrique du Nord, malgré une bonne couverture Internet et une forte pénétration de téléphone mobile. En conséquence, il faudra, pour impulser l’e‑commerce et favoriser la création d’emplois, que les banques mettent à disposition des moyens de paiement dématérialisés. D’autre part, des investissements complémentaires seront également indispensables dans les infrastructures de transport, afin de faciliter l’acheminement des colis des vendeurs aux acheteurs.
L’existence d’une finance numérique développée, avec des connexions haut débit et des systèmes de paiement modernes et adaptés, permet le développement d’une nouvelle économie favorisant la relance et la création d’emplois de qualité au profit des jeunes en Afrique du Nord. Le développement des services financiers numériques peut être un vecteur de transformation économique, sociale et culturelle. Ces services favorisent l’inclusion financière en offrant aux ménages et aux PME (petites et moyennes entreprises)‑PMI (petites et moyennes industries) des solutions de financement et d’assurance adaptées. Ils réduisent les formalités administratives et les coûts commerciaux, et génèrent de nouvelles opportunités de relance pour l’économie dans son ensemble.
La digitalisation a favorisé le développement du commerce électronique en Afrique du Nord, qui a connu une évolution rapide, caractérisée par une croissance annuelle de 6.2% sur la période 2005‑17. Cette dynamique est rendue possible grâce aux ressources technologiques (smartphones, accès au mobile et à Internet, 4G) et au capital humain renforcé par un nombre important de jeunes diplômés. Cependant, la part de l’e‑commerce dans les exportations reste encore faible, à environ 8 % sur la période 2010‑17, avec une dynamique variable suivant les pays. Des services livrables uniquement par le réseau des technologies de l’information et de la communication (TIC) naissent ainsi comme supports à la clientèle dans de nombreux domaines (services après‑vente, assurances et banques), et constituent des opportunités de création d’emplois nouveaux.
En effet, face au coût de la main‑d’œuvre élevé dans les pays développés et à l’essor des TIC dans de nombreux pays en développement, bien des entreprises ont délocalisé leurs centres d’appel. Paradoxalement, la contribution des services digitaux aux exportations est relativement plus importante dans les pays disposant d’une faible couverture numérique (Algérie et Mauritanie), en raison de leur potentiel d’exportation limité. Cependant, le chiffre d’affaires des services digitaux est caractérisé par une tendance baissière au cours de ces dernières années, en raison de la crise du Printemps arabe, qui a conduit à la relocalisation de nombreuses entreprises offrant ce type de services.
Une faible présence de l’e-commerce
Le faible niveau de l’e‑commerce et des services livrables, en relation avec l’insuffisance de startups actives, montre que l’Afrique du Nord ne parvient pas encore réellement à tirer parti de la digitalisation pour dynamiser l’emploi. En effet, la région reste caractérisée par un faible développement des startups, réparties de façon inégale au sein des pays et entre eux, selon Crunchbase (2020b) : en Égypte, seules 92 startups ont pu lever plus de 100 000 USD entre 2011 et 2020 ; pour l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, ce sont respectivement 3, 13 et 13 startups. L’impact des startups sur l’emploi reste par ailleurs limité sur le plan spatial, en raison de leur localisation dans les centres urbains. Cette concentration, en relation avec les inégalités spatiales d’accès à Internet, met en évidence la nécessité d’améliorer non seulement le cadre institutionnel pour le développement des startups, mais également leur extension à d’autres villes.
En Afrique du Nord, l’Égypte, le Maroc et, dans une moindre mesure, la Tunisie, sont les trois pays où des startups spécialisées en fintech sont les plus présentes, en raison d’un écosystème favorable caractérisé par un soutien gouvernemental important, d’une bonne implication du secteur privé et de niveaux d’éducation satisfaisants. Par contre, les obstacles souvent mentionnés dans les pays de la région sont le manque de confiance, la résistance au changement, la rigidité de la réglementation ou la lenteur de son actualisation (crowdfunding, blockchain, etc.), les questions de sécurité numérique et de fiabilité, ainsi que la fragmentation des marchés.
Le faible dividende digital en Afrique du Nord peut être également lié à la qualité de l’éducation, au déficit de compétences technologiques et à l’inadéquation entre les besoins du marché du travail et les cursus de formation. L’indice d’agilité digitale en 2018 (Euler Hermes, 2019) voit les pays nord‑africains mal classés, avec le Maroc en 77e position, avant l’Égypte (80e), la Tunisie (84e), l’Algérie (92e) et la Mauritanie (114e).
Au Moyen‑Orient et en Afrique du Nord, seuls 56 % des employeurs estiment disposer d’employés suffisamment qualifiés pour atteindre les objectifs, tandis que 55 % pensent qu’il y a un déficit entre les compétences attendues et celles des demandeurs d’emplois (YouGov, 2016). Ce fossé de compétences est encore plus persistant en ce qui concerne les prérequis en connaissance digitale, en raison des profils de formation. En effet, comme le suggère Youth Employment in the Mediterranean, la proportion d’étudiants de l’enseignement supérieur inscrits dans des programmes d’ingénierie, de fabrication et de construction reste globalement faible : seuls 20.7 % des hommes, contre 10.2 % pour les femmes, sont inscrits dans des filières scientifiques. Une réadaptation des cursus de formation aux exigences du marché du travail s’avère donc une nécessité pour des gains accrus en termes de digitalisation.
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